Sur
une table anonyme cachée par mille papiers... Dans une pièce sombre,
les objets dansants au gré des flammes de cette cheminée s’essoufflant à
être chaleureuse : une âme emplit la pièce.
Le bourdonnement du foyer comme seule musique au son grave, pétillant parfois par quelques notes pétantes d'une bûche de chêne agonisante, donne à mon âme et mon cœur cette tristesse aussi profonde que cette symphonie éphémère.
" Voir le monde dans un grain de sable
Et le paradis dans une fleur sauvage
Tenir l'infini dans le creux de la main
Et l'éternité dans une heure. "
William Blake
Le bourdonnement du foyer comme seule musique au son grave, pétillant parfois par quelques notes pétantes d'une bûche de chêne agonisante, donne à mon âme et mon cœur cette tristesse aussi profonde que cette symphonie éphémère.
A
mille lieues, d'ici, une famille souffre dans la douceur du printemps
Mauricien. Pleure, une épouse, une mère, une tante aimante qui s'en est
allée. Femme de couleur, ni blanche, ni noire, couleur café, née loin
des cultures de thé dans une famille de la classe moyenne, elle veillait
que les flammes des nobles causes de la liberté, de la curiosité et de
la société ne s'éteignent pas.
Toujours
avide de savoir, elle apprenait des gens, elle suivait des cours
gratuits, parlant déjà l'anglais, le français et le créole elle
s'entichait de la langue espagnole. C'est une manière que les gens de la
classe moyenne utilisent pour sortir des contingences quotidiennes, un
façon de voyager grâce à la culture. Un ordinateur d'un autre temps et
une connexion Internet d'une qualité proche de la nôtre lui
suffisaient.
Ce
savoir, elle le partageait, le transmettait à ses nombreux auditeurs,
amis et correspondants. Elle était un relais, capable de se remettre en
question, elle discutait volontiers des sujets.
Artiste
dans l'âme, elle peignait les mûrs entourant son jardin, laissant ses
enfants les taguer d'images sorties de leur imagination.
Elle
était généreuse dans le verbe, créatrice infatigable, de rien elle
faisait un objet, d'un mot juste, elle percutait notre esprit somnolent,
et d'une phrase bousculait nos certitudes mais toujours gentiment.
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Coucher de soleil à Pointe-aux - Sables par May Joan Lamb le 20 mars 2012 |
Elle
aimait partir comme ça sur un coup de tête, guidée par une force
mystérieuse, photographier les paysages magnifiques qu'offrent l' Île
Maurice.
Elle
s'offusquait sans colère des "murs de Berlin" qui séparaient les
touristes du peuple bigarré mauricien. Elle constatait aussi les ravages
que fait la drogue sur une jeunesse aussi désemparée que la nôtre. Elle
avait beaucoup de projets comme par exemple travailler bénévolement
dans une structure associative pour aider les gens de son quartier.
Elle
avait un cœur gros comme ça... mais un sang anémique, une pression
faible, une tumeur grosse comme un pamplemousse ont eu raison d'elle
mais pas de son souvenir qu'elle laisse comme une trace indélébile.
On
dit que Dieu se cache en nous pour qu'il soit difficile à trouver. On
dit aussi, que lorsque une personne s'en va une étoile s'allume. J'ai regardé le ciel, il n'y a rien de particulier à signaler, l'étoile brillait simplement en moi comme chez ses proches. May Joan Lamb-Ng était à elle seule une étoile filante et la voie lactée... généreuse.
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"J'ai toujours pensé que chaque chose arrivait pour une raison" May Joan Lamb-Ngune |